Quand le théâtre entre à l’EHPAD : une aventure intergénérationnelle à Ganges

21 mai 2025
À Ganges, 6 mois durant, les murs de l’EHPAD « L’Accueil » ont résonné d’une énergie singulière : celle du théâtre et de la rencontre intime entre 2 moments charnières de la vie : la jeunesse et le grand âge. Vendredi 16 mai, au Théâtre Albarède, le public a pu découvrir la restitution de cette aventure humaine et artistique riche en émotions.
Tout commence quand la compagnie théâtrale Le Groupe O, co-dirigée par Lara Marcou et Marc Vittecoq, sollicite le Théâtre Albarède de Ganges et sa directrice Agathe Arnal, pour mener une résidence artistique à l’EHPAD « L’Accueil », dans le cadre du dispositif « Culture et Santé » de la DRAC Occitanie. Objectif : ouvrir les portes de l’art à ceux que la maladie ou l’âge isole, et retisser les liens du sensible.
Les lycéens se joignent aux aînés
Agathe a alors l’idée d’y associer une classe de Terminale SAPAT (Service aux personnes et animation des territoires) du lycée voisin, Le Roc Blanc. L’évidence géographique — L’Albarède, l’EHPAD et lycée sont situés dans la même rue — se double d’une conviction forte :
Il faut multiplier les regards pour créer de belles choses transversales. Nous sommes tous voisins, la communication était d’autant plus évidente.
commente la directrice de l’Albarède.
Pour Lara, ce choix fait tout de suite sens :
Je me suis dit que les jeunes et les aînés ont plein de points communs : ils sont pleins de métamorphoses physiques, ils ne sont pas pris au sérieux… ils ont des problématiques communes qu’il était intéressant d’explorer.
Le Département partenaire du projet
Le Département de l’Hérault s’associe très vite à cette initiative et soutient le projet, dans le cadre de sa politique « Culture et Solidarités » engagée en faveur des plus âgés hébergés en EHPAD, aux côtés d’autres partenaires : la DRAC Occitanie, Le Théâtre Albarède et l’EHPAD L’Accueil, en lien avec le lycée professionnel Le Roc Blanc.
Pendant 6 mois, Lara Marcou, accompagnée du comédien Matthias Hejnar, mène des ateliers avec huit lycéens et sept résidentes, sous l'oeil attentif et dévoué d'Isabelle, l'animatrice de l'EHPAD.
Ils travaillent d’abord des scènes, expérimentent l’improvisation, puis les jeunes prennent la main : ils animent à leur tour des séances de théâtre auprès des aînées. Très vite, les échanges dépassent le cadre pédagogique : les regards sont tendres et bienveillants, les confidences se révèlent, des rires éclatent.
Quand les échanges deviennent intimes
Noellya, lycéenne, raconte :
Cela a été des moments très intenses. Il y avait de la bienveillance, de l’écoute, un respect qu’on ne voit plus toujours aujourd’hui. Ça nous a apporté pour notre expérience future. Il faut penser à ses aînés, c’est grâce à eux qu’on est là. Et un jour, on sera comme eux.
Loïc, lui, confie :
Il y a eu beaucoup d’émotions. On a beaucoup rigolé, on s’est raconté nos histoires, même des choses qu’on ne dit pas à nos amis…
Du côté des résidentes, la joie est partagée. Christine, 86 ans, s’amuse :
Ça m’a fait beaucoup de bien. On a créé des liens. Eux, dans la rue, ils me reconnaissent tout de suite. Moi, un peu moins bien ! (rires) Tout de suite on fait un brin de causette et on est contents de se revoir. Un lien fraternel s’est créé.
Simone, 91 ans, va plus loin :
Ils nous ont redonné la joie de continuer à vivre.
Et Maryvonne d’ajouter :
On a rencontré des jeunes super sympas, attentifs aux mamies que nous sommes. Ça a pris tout de suite. Ils ont retrouvé des grands-mères, et nous, des petits-enfants.
Le Département et l’Albarède convoquent une exposition
Pour garder une trace de cette aventure, le Département et le Théâtre Albarède ont invité la photographe Emmanuelle Fréget et l’autrice Sarah Fourage à rejoindre l’aventure. Leur mission : témoigner de ces instants précieux, en capter la joie et la profondeur.
Nous étions à la fois témoins et actrices, raconte Sarah. On extrayait parfois les participants des ateliers pour des moments de pauses vivantes. On a été très touchées par la sensibilité des lycéens, leur soin naturel envers les aînées. Cette aventure nous a bouleversées.
Emmanuelle Freget, elle, parle de son travail comme d’un fil à tisser :
On a essayé de trouver des chemins de rencontre. J’ai été particulièrement touchée car je suis une photographe de lien, c’est le fil conducteur de mon travail. Pour moi, l’image est la conséquence du moment partagé. Ce projet a été un vrai bonheur.
Le fruit de ce regard croisé a donné lieu à une exposition sensible et forte, scénographiée par la plasticienne Jeanne Bourrat, et dévoilée au public, venu nombreux, le 16 mai au Théâtre Albarède. Cette exposition voyagera ensuite dans d’autres lieux dans le Gangeois.
En clôture, Lara Marcou et Matthias Hejnar ont présenté une création théâtrale inspirée de leur travail de résidence au sein de l’EHPAD.
Entre reconstitution et fiction, les deux comédiens ont entamé un dialogue existentiel sur la vieillesse, la fin de vie, la dignité.
Un spectacle poignant, traversé de tendresse et d’éclats de rire, qui a laissé le public ému aux larmes.
Crédit photos en noir et blanc issues de l'exposition :
©Photographies Emmanuelle FREGET
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